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Ben tiens, en voilà une qui n'est pas en reste : la 2A3/6A3 ou son à peu près 6B4G est un de ces tubes "mytiques" qu'on ne remet pas en question comme ça, mon p'tit bonhomme !

Qu'est-ce qui peut pousser à envisager un crime aussi odieux ?

Ok, une 2A3 c'est beau le jour comme la nuit. A 100 € pièce au bas mot et si on a de la chance pour de la qualité passable en modèle biplaque et le double pour une monoplaque, ça peut et ça fait réfléchir un brin !

N'imaginez pas que je sois particulièrement grippe-sous mais ce fut bien mon point de départ car n'oublions pas qu'un tube s'une plus vite qu'un CD, et même qu'un vinyle. Si alors on se tourne vers des alternatives crédibles avec un minimum d'esprit d'ouverture et/ou avec de la chance, on finit par tomber sur cet objet d'apparence insignifiante qu'est la 5687 (10-15 € en version NOS d'origine américaine) ... ça sent la resucée de David et Goliath !

D'abord, on jette un petit coup d’œil aux courbes et caractéristiques disponibles ici et ici et on s'aperçoit que deux 5687 (soit quatre triodes) montées en parallèle dépassent sur quasiment tous les plans les 2A3/6B4G (gain, résistance plaque, transconductance, tension maximale de plaque, capacités inter électrodes sauf en ce qui concerne la capacité filament - cathode). La puissance nécessaire au chauffage est cependant plus importante. On reviendra sur ces faiblesses.

Deux 5687 font en outre jeu égal avec une 2A3 en terme de dissipation plaque maximale.

Quant-à  l'argument de la prétendue monstruosité contre nature du montage parallèle de triodes, je le balaye l'argument au triple titre :

- qu'une variante très répandue de la 2A3 et qu'à ma connaissance toutes celles de la 6B4G sont en réalité formées d'un assemblage de deux triodes au sein de la même enveloppe ... une sorte de tube siamois ;

- que les montages PSE sont légion, y compris sur base de la légendaire 300B ;

- que sous un certain angle et en particulier si on imagine de découper une 2A3 en fines tranches, on réalise que n'est rien d'autre qu'un assemblage en parallèle d'une infinité de triodes unitaires.

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Mais il y a mieux quand on envisage la conception d'un amplificateur :

- le recul de grille

dans les mêmes conditions de polarisation (le très académique 240V/65mA), il est de -11,5V contre -40V. Ce qui implique que pour une atteindre pleine modulation du tube final, l'étage tension de l'amplificateur (car n'oublions pas que c'est in fine pour lui qu'on se casse la tête et par pour une mauvaise lampe de chevet ou un chauffage d'appoint) n'exige pour driver deux 5687 que un peu plus du quart de la tension crête à crête nécessaire à une 2A3. A la clé, un notable gain en linéarité de l'amplificateur pris dans son ensemble (et c'est bien comme ça que nos oreilles le prennent).

On conçoit bien sur cet exemple les avantages qu'il y a à considérer la conception d'un amplificateur dans sa globalité (y compris alimentation d'ailleurs) et non par morceaux : d'une part la capacité grille-cathode défavorable à la 5687 dans l'absolu est en l'occurrence à relativiser grâce au balayage nécessaire nettement inférieur ; d'autre part, les caractéristiques d'une 2A3 sont indiscutablement splendides mais pas nécessairement optimales dans le cadre du design global d'un amplificateur.

- quelques extras offerts par la 5687

- tube moins fragile,

- tube moins microphonique,

- produit moins de bruit d'alimentation des filaments,

- tube(s) moins volumineux plus facile(s) à loger,

- chauffage possible en 12,6V,

- la haute tension peut être réduite du fait de la moindre perte dans la résistance de cathode dans le cas de la polarisation automatique. Sur un amplificateur existant, on peut ainsi par exemple améliorer le filtrage de la HT par insertion d'un étage RC supplémentaire dans la ligne d'alimentation.

- et quelques inconvénients

Bon, d'accord, une 5687, ce n'est pas une triode à chauffage direct, certains trouveront à redire.

Et puis, la consommation de courant de chauffage (la raison pour laquelle je vous bassine avec la 6B4G plutôt d'ailleurs qu'avec la moins courante 6A3 est qu'elle s'alimente en 6,3V comme les 5687, et qu'elle est montée en support OCTAL ce qui ne gâche rien. Parce qu'enfin, les transformateurs qui délivrent les 2,5V / 2,5A que requiert une 2A3 ne se trouvent pas sous le sabot d'un bourrin !) dessert l'assemblage de deux 5687 : 1,8A conte 1A pour une 6B4G.

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Un test pour pas cher

Rappelons que l'objectif est de remplacer le tube de sortie par un couple de 5687 montées en parallèle.

On pourra prendre la précaution de doter les grilles de chaque tube d'une résistance en série si des accrochages HF ont tendance à se produire. Je n'ai pas rencontré ce problème dans le prototype construit.

Prenons le cas courant d'un amplificateur à modifier de configuration  mono single-ended, tube de sortie en polarisation automatique par résistance de cathode et condensateur; un classique ! L'idéal serait qu'il soit équipé de 6B4G car nous disposerions alors des 6,3V  pour le chauffage des deux 5687 de remplacement, encore qu'on a vu que la puissance à disposition pourrait se révéler notablement insuffisante pour assurer cette fonction. Il est peu probable en outre que les 6,3V qui en général alimentent l'étage d'entrée puissent assurer la chauffe de l'assemblage des deux 5687 de sortie étant donné la puissance demandée. Dans le cas général probablement et dans celui d'un montage équipé en 2A3 à coup sûr, un petit transformateur auxiliaire sera donc requis. Ne pas oublier d'en fixer le potentiel sous peine de ronflements intempestifs.

Moyennant ce prérequis, la seule modification au montage consiste dans le changements de la résistance de cathode du tube de puissance. qui doit développer 11,5V à ses bornes pour 65mA de courant au repos,ce qui nous conduit à une valeur normalisée de 180 Ohm. A noter qu'il est plus pertinent de doter chaque cathode de sa résistance individuelle de manière à mieux équilibrer les courants dans chaque triode et d'éviter une surcharge par effet dominos au cas où l'un des tubes défaille. Dans cette configuration évidemment, la valeur des résistances à monter est quadruplée (708 Ohm en principe soit par exemple 5 600 Ohm en parallèle avec 820 Ohm). Ne pas oublier le condensateur de bypass (1 000 µF/40V par exemple)

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Pour l'amplificateur pris en exemple,  la modification peut être réalisée très aisément directement sur le culot tube de puissance existant puisqu'il dispose de toutes les connexions requises à l'exception de la masse qui peut normalement être prise n'importe où sur le châssis sans démontage et reprise du câblage. il est ainsi possible de réaliser un essai commodément réversible puisque rien ne se trouve modifié sur l'amplificateur d'origine.

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Attention, il y a en toute hypothèse lieu de se reporter au schéma de l'amplificateur d'origine pour s'assurer des conditions exactes de la modification envisagée. Certains montages peuvent en effet présenter des spécificités à prendre en compte impérativement :  polarisation négative de grille, liaison directe entre étages etc. 

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Les autres substitutions  possibles

- amplificateurs parallel simple-ended, montages push-pull, etc.,

- triodes 45, VT52, 300B etc.,

- pentodes en montage triode : 6550, 6l6, KT66, KT88/6550, EL84/6BQ5, EL34/6CA7, 6V6 etc.

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Le bilan

La modification d'un amplificateur n'est certes pas aussi directe et immédiate qu'on veut bien le laisser entendre (ou lire). Toutefois en l'occurrence, il y a lieu de considérer les performances qui sont à portée, tant au plan technique qu'économique.

Dans le cas d'un projet nouveau , l'alternative 5687 à la 2A3 est à considérer très sérieusement.

 

Les modifications possibles

- dans la mesure où les exigences concernant l'étage d'entrée sont réduites, on peut envisager sa modification et en particulier sa simplification.

- ainsi, l'ordre de grandeur des tensions à délivrer pour commander un couple de 5687 de sortie ouvre cette fonction aux semi conducteurs et notamment aux amplificateurs opérationnels intégrés (ce qui n'est une simplification qu'en apparence) ;

- si étant donné le gain à produire à l'origine l'amplificateur en tension comportait deux étages, on peut imaginer la suppression de l'un d'entre eux. On peut ainsi se retrouver avec un assemblage de deux étages amplificateurs à tubes et on sait que cette configuration paire, mettant à profit l'opposition des phases des signaux produits par chaque étage, réduit la distorsion globale de l'amplificateur sans recours à des artifices.

- toutes les variations relatives à la charge de cathode des tubes de sortie restent offertes : sources de courant bypasées, sources de tension, enroulement transformateur de sortie, j'en passe ...

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Un prototype ici

Bon, comment dire, il n'est pas ... beau mais il fonctionne parfaitement chaque jour de l'année. N'oublions pas que c'est une plateforme d'expérimentation exploitée depuis déjà longtemps. Rapide survol :

- alimentation HT double alternance par 5U4G (normalement 5U4GTY plus basse qui me permet en principe de poser la grille supérieure si, si !),

-  filtrage par condensateur en tête et self ;

- alimentation de tous les filaments en alternatif ;

- étage d'entrée cathode commune parallèle 5687 ;

- couplage par condensateur ;

- étage de sortie double 5687 en parallèle ;

- polarisation de chaque triode de sortie par source de courant (LM317) bypassée  par électrochimique (pas le meilleur choix à mon avis) ;

- transformateurs de sortie single ended d'impédance primaire 2 500 Ohm.

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Évolutions

dans l'esprit de mes réalisations hybrides, liaison directe de bout en bout et contre réaction d'écran sur tube d'entrée. Grosse optimisation du point de fonctionnement de l'étage de sortie en sus.

A suivre, ici.

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Trésors glanés

Vous trouverez ici une brillante illustration de cette forme d'esprit que les anglo-saxons appellent "to think out of the box" et qui met à l'honneur ... la 5687.

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Synthèse

A titre de comparaison globale, voici :

- d'une part les graphes tension-plaque/courant-plaque des deux tubes mis à l'échelle. On voit clairement que la résistance interne de l'assemblage de 5687 est inférieure à celle d'une 2A3 et que la puissance maximale à taux de distorsion modéré devrait être plus importante compte tenu du maintien de la régularité de l'espacement des courbes aux tensions plaques croissantes. On voit aussi que la pleine modulation de l'étage de sortie ne requiert que 20Vcc contre 87Vcc pour une 2A3 ;

- d'autre part un tableau comparant le fonctionnement de la 2A3 dans une configuration classique et celui d'un assemblage de deux 5687. En vert les forces en rouge les faiblesses, en jaune jeu égal. La prédiction se vérifie largement !

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